Cancer
Interview de Aurélie GRALL, psychologue, publiée le 17/06/2013 (cliquer ici)
Pour avoir exercé plus de 10 ans en oncologie, je sais à quel point l’annonce du cancer est un séisme qui ébranle le patient lui-même et chaque membre de sa famille.
L’annonce du diagnostic
- L’annonce = choc / traumatisme/ souvent vécue comme une sentence de mort.
- Blessure narcissique,
- Sidération, déni,
- Pertes et deuils (physique, relationnel, professionnel, projet de vie),
- Angoisses morbides (idées d’incurabilité),
- Solitude,
- Souffrance.
Le traitement
Plusieurs possibilités thérapeutiques :
- en fonction du type de cancer,
- de sa localisation,
- de son degré de gravité,
- de l’âge et l’état général de la personne.
Les traitements nécessitent des efforts d’adaptation importants et engendrent souvent une grande détresse émotionnelle.
Les traitements donnent des symptômes jusqu’alors inexistants ou peu présents.
Des évolutions : immunothérapie, thérapies ciblées, développement des soins ambulatoires
Les effets indésirables du traitement
- Chirurgie : mastectomie, tumorectomie, exérèse ➔ mutilation, mutation corporelle.
- Chimiothérapie ➔ alopécie, perte de poids, nausées, douleurs…,
- Radiothérapie ➔ tatouages, brûlures,
- Hormonothérapie ➔ bouffées de chaleur, prise de poids,
- Pertes réelles ou symboliques : un organe, un sein, sa féminité, son identité…
- Peur de souffrir, de mourir, de ne pas s’en sortir…
- Les traitements sont très souvent lourds et invasifs. Les journées sont bien remplies et ritualisées par les RDV : chirurgie, cures de chimiothérapie, séances de radiothérapie, bilans, examens, etc…
La fin des traitements
= ARRET PARTIEL OU TOTAL DES TRAITEMENTS
- Sentiment d’abandon par les soignants,
- Sentiment d’insécurité (fantasmes de prolifération cancéreuse due à la fin des traitements),
- Séquelles physiques et psychologiques,
- Hyper vigilance somatique,
- Angoisses.
En période de rémission, clivage du malade : joie de se sentir revivre ET peur de la récidive.
= Epée de Damoclès
Force est de constater que la « bonne nouvelle » énoncée par l’oncologue de la fin des traitements, souhait attendu ardemment par le patient durant tout son parcours de soin, ne se passe finalement pas tout à fait comme cela dans la réalité.
En effet, ma pratique auprès de cette patientèle m’a prouvé dans une grande majorité de situations qu’avec la fin des traitements coexiste un sentiment très fort d’abandon. Le patient n’est alors plus « objet de soins », choyé par l’équipe médicale, sécurisé par l’institution, mais il se retrouve seul, confronté à de multiples questions, des angoisses qui émergent, une souffrance morale intense qui peut parfois déboucher sur un effondrement psychique.
Il est primordial pour les patients qui traversent toutes ces étapes de pouvoir verbaliser et d’exprimer leur ressenti.
L’entourage du malade
La famille et les proches (amis, collègues) sont aussi très malmenés par la maladie. Ils s’inquiètent, ne savent pas quelle attitude adopter. Ils oscillent entre surprotection et fuite en avant.
Quelle vérité faut-il dire aux enfants ? Souffrent-ils de la situation ? La maladie de leur parent a-t-elle des répercussions sur la scolarité ?
Toutes les pathologies chroniques, les maladies incurables ou orphelines, mettent en oeuvre des mécanismes psychologiques très particuliers qui peuvent être atténués avec l’aide d’un psychologue, tant pour le patient, que pour son entourage en souffrance.